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Promotion de la bancarisation en Afrique
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4 mars 2008

Afrique : Réinventer la banque

              bq_ng_cityExploitant les opportunités qu’offrent les pays ayant des économies stables, les banques investissent l’Afrique Subsaharienne. Une banque chinoise a déboursé quelque 5,6 milliards de dollars pour acheter 20% d’une banque Sud-africaine.

 

Il n’y a pas si longtemps, les banquiers internationaux avaient l’habitude de lancer une cruelle plaisanterie disant que l’Afrique subsaharienne était plus un marché submergent qu’émergent. Les banques locales n’avaient aucune raison de changer cette impression. A cause des bouleversements politiques et économiques, des marchés informels et minuscules et des infrastructures inexistantes, la plupart d’entre elles se faisaient des bénéfices avec très peu d’effort. Utilisant le gisement des dépôts à faible taux de rémunération pour financer le gisement des bons du Trésor à fort rendement, elles enregistraient l’une des meilleures marges d’intérêt du monde. La conséquence, évidemment, c’est l’exclusion de la plupart des africains de l’accès aux services financiers. Aujourd’hui, la mentalité est en train de changer. Selon le FMI, l’Afrique connaît sa période de meilleure performance économique depuis l’indépendance. La croissance du PIB réel a été de 5,7% en 2006 et devrait passer à 6,1% cette année pour atteindre 6,8% en 2008. Cette bonne performance est en partie dûe à la hausse du prix du pétrole et des matières premières. L’aide étrangère y est également pour quelque chose. Mais elle s’explique aussi par une meilleure gestion de l’économie, plus d’ouverture et une plus grande stabilité politique. Ces politiques signifient que les banques doivent travailler davantage pour faire des profits, mais aussi les aider à croître. Cela les encourage à chercher de nouveaux clients, et ils n’ont pas tort. Un rapport de la Banque mondiale publié le 13 novembre affirme que la promotion de l’accès aux services financiers en Afrique devrait être une priorité, car elle stimule la croissance et contribue à réduire l’écart de revenus entre riches et pauvre. Pourtant jusqu’ici, seuls 20% des familles en Afrique disposent de comptes bancaires. Les petites et moyennes entreprises se bagarrent pour être financées. Le crédit privé à la consommation représente 18% du PIB en Afrique, et moins de 5% dans des pays comme l’Angola, le Tchad, le Congo, la Guinée-Bissau et la Sierra Leone, comparé à 30% en Asie du Sud. L’Ethiopie, l’Ouganda et la Tanzanie ont moins d’une agence bancaire pour 100.000 habitants. L’ouverture d’un compte au Cameroun exige 700 dollars, ce qui est largement supérieur au revenu annuel par habitant. Au Swaziland, une femme a besoin du consentement de son père, son mari ou frère pour ouvrir un compte ou demander un prêt, et 75% des adultes n’ont pas une adresse vérifiable. Même en Afrique du Sud, où le secteur financier est beaucoup plus sophistiqué, près de la moitié des adultes n’ont pas de comptes bancaires. Des millions d’Africains gardent leur argent dans des bas de laine ou mettent leur épargne dans du bétail.

 

Dans des pays comme l’Afrique du Sud, le Kenya et l’Ouganda, beaucoup se tournent vers des services informels, tels que les associations de microcédits ou les mutuelles d’épargne et de crédit. La microfinance a comblé une partie des besoins. Mais ces associations sont petites, et les banques sont généralement beaucoup mieux outillées pour fournir des services financiers à grande échelle. Dans de nombreux pays, non seulement les politiques monétaires se sont améliorées et sont plus prévisibles, améliorant l’environnement, mais la privatisation des banques d’Etat a également créé de nouvelles opportunités et a contribué à l’amélioration de la réglementation.

 

Faible bancarisation

En 2004, la Banque centrale du Nigéria a fait passer le capital minimum des banques de 2 milliards de nairas (15 millions de dollars) à 25 milliards, et a limité la participation étatique maximale dans les banques à 10%. Le nombre de banques a diminué de 89 en 2004 à 25 aujourd’hui, mais le nombre d’agences et succursales a augmenté de plus de 600. Jusqu’ici, affirment les experts, les placements sur le marché boursier en ébullition, ont financé la plus grosse part de l’augmentation de capital. La rentabilité de certaines banques devrait baisser. Mais les guichets automatiques de banques (GAB) font tellement partie de la vie des grandes villes du Nigéria, que les files d’attente s’étirent parfois sur plusieurs mètres dans la rue. D’autres signes poussent à la prudence: une banque nigériane, United Bank Of Africa, a promis des crédits sans «wahala». Et tous les Nigérians savent que wahala signifie «ennuis». Les géants mondiaux arrivent. L’amélioration du contexte attire les géants étrangers. La Banque industrielle et commerciale de Chine, avec le plus important investissement jamais réalisé en Afrique, a offert 5,6 milliards de dollars pour 20% du capital de la Standard Bank, géant sud africain, présent dans 18 pays du continent. En 2005, Barclays, la banque britannique implantée en Afrique depuis plus d’un siècle, a acquis une participation majoritaire dans l’ABSA, une autre banque sud-africaine. Ses ambitions s’étendent sur l’ensemble du continent, et elle estime que son parrainage de la «Premier League» anglaise, une sorte de religion dans les pays africains férus de football, lui a donné de la notoriété, en tout cas plus que son origine coloniale. «Partie de rien, la bancarisation de l’Afrique est bien partie», affirme Frits Seegers, Directeur Barclays. Jusqu’ici, la banque travaillait avec ce qu’elle appelle le sommet de la pyramide en Afrique; aujourd’hui, stimulée par la concurrence des banques locales africaines et son expérience dans les marchés émergents d’Asie, elle vise les classes intermédiaires et basses. L’Afrique du Sud sert de laboratoire au reste du continent, bien que son économie soit beaucoup plus importante que celle de ses voisins et que les résultats puissent ne pas être parfaitement reproductibles ailleurs. Avec la fin l’apartheid, le gouvernement a encouragé les banques pour la création de produits moins chers et plus simples. Elles ont ouvert des agences dans les zones non-bancarisées, avec des locaux préfabriqués ou même dans des camionnettes qui se rendent régulièrement vers les zones mal desservies. D’autres pays en font de même. Dans les zones reculées où la livraison d’espèces est difficile, des mini machines ont été installées dans des magasins où les clients impriment un bordereau qu’ils présentent au commerçant, qui leur fournit l’argent. Les succursales et guichets de certaines zones rurales comptent sur l’énergie solaire et les liaisons téléphoniques par satellite. Les nouvelles technologies aident également.

Effet Domino

Peu d’africains ont un compte en banque, mais beaucoup d’entre eux ont un téléphone mobile: au Kenya et au Botswana par exemple, 17% de ceux qui sont non bancarisés possèdent un téléphone mobile, selon le FinMark Trust, un groupe de recherche visant à rendre plus accessibles les services financiers. En Afrique du Sud, au Congo et au Kenya, les services financiers sont proposés sur les téléphones mobiles, même s’il n’est pas toujours évident de savoir s’ils peuvent être appelées produits bancaires ou non. Les abonnés peuvent ouvrir des comptes, vérifier leur solde, payer leurs factures ou transférer de l’argent en tapant quelques commandes sur son téléphone mobile. Au Kenya, où 3 millions de personnes ont des comptes bancaires, près d’un million utilise M-PESA, un système de paiement mobile. Après avoir appris des leçons de leur marché domestique, les banques sud-africaines exportent leurs innovations de pionnières ailleurs dans la région. La Standard Bank alimente une succursale isolée sur une île du lac Victoria en Ouganda grâce à des avions qui parachutent des sacs de liquides. La banque compte sur sa force de vente mobile et l’extension rapide de son réseau de GAB en Ouganda. Plus de 128 GAB s’y sont ajoutés. Dans un pays de 30 millions d’habitants, elle a ouvert près de 700.000 nouveaux comptes, en cinq ans, et contrôle 40% du marché. Quand ses actions s’inscrivaient à la cote de petite, la bourse locale de cette année, elles ont connu une progression de 200%, et le volume quotidien échangé a été le plus important jamais réalisé. ABSA, quant à elle, est en train d’élaborer des techniques modernes de notation pour la clientèle à qui aucun crédit n’a jamais été accordé auparavant. En réduisant les coûts et en augmentant le volume, elle estime que le microfinancement est au moins aussi rentable que ses autres services. Mais la concurrence entre les banques s’est exacerbée. Au Ghana, la Barclays travaille avec les collecteurs «Susu», qui récupèrent l’argent de petits commerçants pour le garder moyennant rémunération. Les clients des collecteurs sont généralement trop petits pour les banques, mais Barclays estime qu’elles représentent collectivement un marché d’une valeur de 75 millions de Livres, soit 154 millions de dollars. La banque offre des comptes d’épargne, des prêts et une formation aux collecteurs «Susu», et dit qu’ils ont aidé à atteindre 200.000 vendeurs ambulants. En deux ans, il n’y a eu aucune défaillance. Malgré tous les progrès accomplis, il reste beaucoup à faire. En dépit des innovations pour attirer de nouveaux clients, les banques doivent encore atteindre une taille critique, réduire les coûts et mieux gérer les risques.

(Source: La Gazette du Maroc, 01/12/2007)

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