La monétique interbancaire pour sauver Dantokpa
Le Bénin vient d'être victime pour la deuxième fois au cours de l'année 2008 d'un braquage sanglant ayant fait plusieurs victimes et d'énormes dégâts. Il s'agit d'une opération digne d'un film hollywoodien. Deux institutions bancaires ont vu leurs agences situées au sein du marché international de Dantokpa démolies, soufflées par des dynamites puissantes utilisées pour ouvrir les coffres-forts. Selon certaines sources, les gangsters auraient emporté la rondelette somme de quatre cent millions de francs cfa.
Au lendemain de ce sanglant remake, les usagers du marché international de Dantokpa ont exprimé leur désarroi et souhaité la fermeture des agences bancaires présentes dans le marché. Dans une sage décision prise en écho à ces aspirations légitimes, le Gouvernement béninois a plutôt opté pour une suspension provisoire des activités bancaires dans le marché et la mise sur pied d'une commission chargée de proposer des solutions pérennes.
Nous ne souhaitons pas anticiper sur les recommandations de la commission mais juste émettre notre avis. Une interrogation qui vient à l'esprit est de savoir pourquoi les banques ont fait le choix d'ouvrir des agences au sein du marché de Dantokpa ? La réponse à cette question coule de source pour qui connaît l'importance du chiffre d'affaire global jounalier réalisé dans ce marché et la part exagérement importante qu'occupe le fiduciaire dans les transactions. Les banques sont au marché pour, entre autres, aider les usagers à sécuriser leurs recettes. Elles contribuent à sécuriser davantage les populations qui sont moins exposées au vol et aux pertes d'argent suite aux incendies. Malheureusement elles sont considérées aujourd'hui comme le principal obstacle à la sécurité du marché. Nous pensons qu'il faut faire la part des chose.
Ce qui est en cause, ce n'est pas la présence des agences bancaires mais l'attrait que représente l'énorme magot qu'elles collectent auprès de leurs clients. Il existe des agences bancaires dans des endroits très réculés du Bénin qui n'ont jamais connu le moindre braquage. Il y a également une concentration d'agences bancaires dans la zone commerciale de Ganhi à Cotonou sans que l'on ne déplore des braquages de ce genre. Le problème, ce n'est pas la présence des agences bancaires dans le marché mais plutôt l'usage exagéré du fiduciaire dans les transactions qui engendre des dépôts en espèces importants au niveau de ces agences. Il est donc possible et même souhaitable de régler ce problème sans pour autant délocaliser ces agences. Et c'est à ce niveau que la monétique pourrait jouer un rôle déterminant.
Une solution que nous préconisons est que l'Etat puisse prendre toutes les mesures nécessaires pour faciliter la mise en place rapide d'une monétique interbancaire au Bénin. Les autorités monétaires sous-régionales ont eu la vision d'entreprendre depuis 1999 la modernisation des systèmes et moyens de paiement dans l'UEMOA. La monétique interbancaire constitue l'une des dernières étapes importantes de ce vaste chantier. Elle est déjà une réalité dans certains pays comme le Sénégal, le Mali et la Côte d'Ivoire. Le Bénin pourrait hâter sa préparation et rendre ce système disponible sur le marché bancaire et financier national. Nous sommes convaincus qu'avec l'argument sécuritaire, il serait très facile de convaincre les usagers du marché Dantokpa à adopter la monétique. Les vendeurs se muniront de TPE (Terminal de Paiement Electronique) et les acheteurs de leurs cartes bancaires ou portes-monnaies électroniques. Les transactions se feront ainsi en toute sécurité. Les agences bancaires pourront alors rester et même se multiplier au sein du marché sans augmenter le risque sécuritaire. Les services bancaires de proximité demeurent nécessaires dans ce marché pour accompagner les usagers notamment les gros vendeurs et acheteurs qui ont besoin de conseils avisés et de crédits pour mener à bien leurs activités.
C'est notre opinion.